Le Prophète (sws) aurait ordonné le meurtre d'Ibn Sunayna ainsi que l'extermination de tous les Juifs !?!

Le Prophète (sws) aurait ordonné le meurtre d'Ibn Sunayna ainsi que l'extermination de tous les Juifs !?!

Collectif Sahab Ed-Dine

Création : 11/05/2010

Mise à jour : 20/08/2010

 

1         Introduction

 

Les missionnaires chrétiens avancent l’idée que le Prophète (saws) aurait ordonné de tuer tous les Juifs qui tomberont entre les mains des musulmans, d'où le meurtre d'Ibn Sounayna. Voici le hadith en question :

 

حدثنا ‏ ‏مصرف بن عمرو ‏ ‏حدثنا ‏ ‏يونس ‏ ‏قال ‏ ‏ابن إسحق ‏ ‏حدثني ‏ ‏مولى لزيد بن ثابت ‏ ‏حدثتني ‏ ‏ابنة محيصة ‏ ‏عن ‏ ‏أبيها ‏ ‏محيصة ‏ 

أن رسول الله ‏ ‏صلى الله عليه وسلم ‏ ‏قال ‏ ‏من ظفرتم به من رجال ‏ ‏يهود ‏ ‏فاقتلوه فوثب ‏ ‏محيصة ‏ ‏على ‏ ‏شبيبة ‏ ‏رجل من تجار ‏ ‏يهود ‏ ‏كان ‏ ‏يلابسهم ‏ ‏فقتله وكان ‏ ‏حويصة ‏ ‏إذ ذاك لم يسلم وكان ‏ ‏أسن ‏ ‏من ‏ ‏محيصة ‏ ‏فلما قتله جعل ‏ ‏حويصة ‏ ‏يضربه ويقول يا عدو الله أما والله لرب شحم في بطنك من ماله ‏ 

  Sunan Abou Daoud, livre des expéditions, nº 3002 (ou nº2608, cela dépend de la numérotation adoptée cf. Al-Islam)

 

Traduction :

Musraf Ben 'Amrou nous a rapporté que Younouss a dit : Ibn Ishâq m'a rapporté que l'esclave de Zayd Ibn Thâbit a rapporté que la fille de Muhayyisah selon son père Muhayyisah que:

« L’envoyé d'Allah a dit: "Si vous remportez une victoire sur les Juifs, tuez-les !" Alors Muhayyisa a sauté sur Shubayba, un marchand parmi les Juifs. Il avait d’étroites relations avec lui auparavant. Il le tua. A ce moment, son frère Huwayyisa n’avait pas accepté l’islam. Il était aussi plus vieux que Muhayyisa. Quand il a tué (le Juif), Huwayyisa l’a frappé, en disant: "Ô ennemi d’Allah, je jure par Allah, tu as sur le ventre un bon paquet de graisse qui vient de ses biens!" »

Note : Dans la chaîne de transmission on retrouve Ibn Ishâq, qui a rapporté ce fait dans sa Sira. Le prénom d'Ibn Sunayna est Shubayba.

 

Le hadith en question n'est rapporté que par Abou Daoud ; cependant on trouve un récit assez similaire dans la Sîra de Muhammad Ibn Ishâq et d'Ibn Hisham. 

Conversion de Huwayyisa, version de Ibn Ishâq 

 

Ibn Ishâq dit :  

L’apôtre d'Allah a dit: "Tuez tous les Juifs qui sont en votre pouvoir". Là dessus, Muhayyisa ibn Mas'ud se rua sur ibn Sunayna, un marchand juif avec qui il avait des relations sociales et commerciales normales, et il le tua. Huwayyisa n’était pas musulman à ce moment, et il était son aîné. Après le meurtre, Huwayyisa commença à frapper son frère, en disant: "Ennemi d’Allah, pourquoi l’as tu tué, alors que le gras qui est sur ton ventre vient justement de sa fortune?"

Muhayyisa dit:

"Si celui qui m’a ordonné de le tuer m’avait aussi ordonné de te trancher la tête, je l’aurai fait!"

Il dit cela, et ce fut le début de l’acceptation de l’islam par Huwayyisa. L’autre répondit:

-Par Allah, si Muhammad t’avait ordonné de me tuer, tu l’aurais fait?

-Oui , par Allah! S’il m’avait ordonné de te trancher la tête, je l’aurai fait!

Il s’exclamait : "Par Allah, une religion qui t’amène à faire cela est merveilleuse!" Et il est devenu musulman. J’ai appris cette histoire par un client des Banu Haritha, par une fille de Muhayyisa, à partir de Muhayyisa lui-même.

Muhayyisa a composé les vers suivant sur cette affaire:

Le fils de ma mère m’a blâmé par ce que si j’avais reçu l’ordre de le tuer

J’aurai frappé sa nuque avec un sabre tranchant,

une lame aussi blanche que le sel à force d’être polie

Mon coup frappe et ne rate pas sa cible.

Cela ne me plaît pas de te tuer volontairement

Et pourtant, nous possédons maintenant l’Arabie du nord au sud.

 

Conversion de Huwayyisa, version de Ibn Hishâm 

 

Ibn Hishâm dit : 

Abû ‘Ubaydah, sur l’autorité d’Abû ‘Amrû al-Madanî m’a dit :  

Lorsque l’Envoyé d’Allah a vaincu les Banû Quraydha, il prit de parmi eux à peu près 400 hommes juifs – et Banû Quraydha étaient les alliés des ‘Aws contre les Khazraj – il ordonna de les tuer. Les Khazraj se mirent à les massacrer, et ils s’en réjouissaient. Alors l’envoyé d’Allah regarda les Khazraj et trouva que leurs visages étaient pleins de joie. Puis il regarda les ‘Aws, et ne trouva pas la même joie sur leurs visages. Il pensa que cela est dû au fait de l’alliance entre les ’Aws et les Banû Quraydha.  

Mais il ne resta des Banû Quraydha que 12 hommes ; alors il les donna aux ‘Aws : à raison d’un homme de Banû Quraydha à deux des ‘Aws, et il dit : « Un tel frappe, et un tel achève de le tuer. »  

Parmi ceux qu’il donna aux ‘Aws fut Ka’b ibn Yehûda, qui était un grand notable parmi les Banû Quraydha. L’ Envoyé d’Allah le donna à Muhayyisa ibn Mas’ûd et à Abû Burdah Nayyâr. Abû Burdah était l’homme à qui l’Envoyé d’Allah a permis d’égorger une chèvre pour le sacrifice de la fête des sacrifices.  

L’ Envoyé d’Allah dit : « Que Muhayyisa frappe Ka’b ibn Yehûda et que Abû Burdah achève de le tuer. »  

Musayyisa le fappa d'un coup qui ne l’a pas coupé, et Abû Burdah acheva de le tuer.   

Alors Huwaysah –qui était alors infidèle- dit à son frère Muhayyisa :  

« As-tu tué Ka’b ibn Yehûda ? »  

Son frère répondit : « Oui. »  

Huwaysah dit : « Par Dieu ! Ton ventre s'est engraissé avec ses biens ! Tu es vil, ô Muhayyisa. »  

Muhayyisa répondit : « Celui qui m’a ordonné de le tuer est celui qui, s’il m’ordonne de te tuer, je le ferais. »  

Huwaysah fut étonné d’entendre cela et le quitta plein de stupeur. On rapporte qu’il se réveilla durant la nuit et s’étonnait de la parole de son frère Muhayyisa, jusqu’au matin, en se disant :  

« Par Dieu, c’est une (vraie) religion ! »  

Puis il se dirigea vers le prophète et se convertit à l’Islam. 

2         Mise au point sur les sciences du hadith

 

Ce récit n'est cité qu'une seule fois dans les corpus de hadith (Sunan Abou Daoud) et dans la Sira d'Ibn Ishâq. Cependant, nos amis les missionnaires chrétiens oublient volontairement de donner les explications des savants musulmans. C’est en quelque sorte un mensonge par omission. Nous savons parfaitement, et l’histoire du développement des différentes sciences islamiques le démontre, que les recueils de hadith ne partagent pas la même authenticité que le Coran.

 

« La science du hadith se rapportant à l’information traditionnelle (Ar-Riwâya) comprend la transmission des dires et des actes du Prophète (saws) et leur authentification. En revanche, la science du hadith relative à la (dirâya) est une science qui sert à définir la véracité de la transmission, ses conditions, ses diverses matières, ainsi que l’état des transmetteurs, leurs conditions et les différents caractères juridiques de la transmission. »

Dr. Temsamani Chebagouda, Les sciences du hadith, éditions LeSavoir, p.217, citant ce que l’Imam As-Souyoûtî a rapporté dans son ouvrage « Tadrîb ar Râwî »

 

Il faut donc vérifier le hadith en le soumettant à différentes conditions afin d’en évaluer l’authenticité. Ce dont nos amis les missionnaires chrétiens se sont bien gardés de faire puisque le sujet ne les intéresse visiblement pas. Pour rappel, un hadith se compose essentiellement de 3 parties :

 

1) L’Isnad ou la chaine de transmission. C’est la chaine des transmetteurs qui rapportent l’information depuis le dépositaire initial jusqu’au dernier rapporteur de celle-ci. 

Exemple : Muhammad ibn 'Ibrâhîm at-Taymy rapporte avoir entendu 'Alqama ibn Waqqâs al-Laythy 

2) Le Taraf ou la fin de la chaine de transmission qui introduit le hadith en question. 

3) Le Matn ou le texte. Il représente le corps du Hadith. 

Exemple : "Tout argent que le musulman dépense pour l'entretien de sa famille, en ne visant rien d'autre que la rétribution d'Allah, lui sera compté pour aumône"

  

1

Isnâd

(chaine de transmetteur)

2

Taraf

(introduction au corps du hadith)

3

Matn

(texte)

 

Ayant ainsi posé très brièvement la science du hadith, rappelons ce que Dieu a dit dans le Saint-Coran :

 يا أيها الذين آمنوا إن جاءكم فاسق بنبأ فتبينوا أن تصيبوا قوما بجهالة فتصبحوا على ما فعلتم نادمين

Traduction approchée :

« Ô vous qui avez cru ! Si un pervers vous apporte une nouvelle, voyez bien clair [de crainte] que par inadvertance vous ne portiez atteinte à des gens et que vous ne regrettiez par la suite ce que vous avez fait. »

[Saint-Coran, Sourate 49 verset 6]

 

Le Prophète (saws) rappelle également ce principe coranique dans plusieurs hadiths authentiques :

 

‏ ‏لا تكذبوا علي فإنه من يكذب علي ‏ ‏يلج ‏ ‏النار ‏

 

« Celui qui ment volontairement sur moi, qu’il prenne sa  place en Enfer »

Ce hadith est rapporté par plus de 70 compagnons du prophète (saws) et il est considéré comme étant « mutawâtir lafzi » (c’est-à-dire notoire verbal). On le trouve notamment dans les ouvrages suivants :

[1] Sahih Al-Bukhârî, n°106 

[2] Sahih Muslim, n°1 

[3] Abou Na’im, Houliya Al-Awliyâ, 8/431 

[4] Ibn Hazm, Oussoul Al-Ahkâm, 1/215 

[5] Adh-Dhahabî, Siyar A’lâm An-Nubalâ, 5/410 

[6] Ahmad Shâkir, ‘Oumda At-Tafsir, 1/151 

[7] Al-Albânî, Sahih Ibn Mâja, n°29 

[8] Al-Albânî, Sahih At-Tirmidhî, n°2660 

[9] Al-Albânî, Sahih Al-Jâmi’, n°7436 et 7437

Source : DORAR.NET

 

Ayant rappelé ces petits faits pour nos amis les évangélistes, je vais maintenant recourir à la critique du hadith en 3 parties. Dans la première partie, nous verrons l’authenticité de l’Isnad, ensuite nous analyserons le récit en lui-même et enfin nous ferons quelques remarques supplémentaires quant à ce hadith.

 

3         Analyse de la chaine de transmission – critique extrinsèque

 

La chaine de transmission dudit hadith d'Abou Daoud :

حدثنا ‏ ‏مصرف بن عمرو ‏ ‏حدثنا ‏ ‏يونس ‏ ‏قال ‏ ‏ابن إسحق ‏ ‏حدثني ‏ ‏مولى لزيد بن ثابت ‏ ‏حدثتني ‏ ‏ابنة محيصة ‏ ‏عن ‏ ‏أبيها ‏ ‏محيصة ‏

Traduction :

"Musraf Ben 'Amrou nous a rapporté que Younouss a dit : Ibn Ishâq m'a rapporté que l'esclave de Zayd Ibn Thâbit a rapporté que la fille de Muhayyisa selon son père Muhayyisa"

Le problème avec cette chaine de transmission c'est qu'il s'y trouve plusieurs personnes faibles et inconnues. Commençons donc par analyser la chaine de transmission.

1/ Ce qui a été dit au sujet de Muhayyisah :

هُوَ اِبْن مَسْعُود بْن كَعْب الْخَزْرَجِيّ الْمَدَنِيّ ` صَحَابِيّ مَعْرُوف ‏

Traduction :

"Il s'agit Ibn Mas'oud Ben Ka'b Al Khazrajî Al Madanî, un compagnon connu."

(Cf. Muhammad Shams Ad-Dine Al-Haq Al-'Adhîm Abâdî, 'ouyoune al ma'boud sounan abî dâoud (عون المعبود شرح سنن أبي داود) Source : Al-Islam)

D'autres sources confirment qu'il faisait également parti des compagnons :

[1] Al-Bukhârî, La grande histoire (التاريخ الكبير), Bab Al Mîm, n°2125. Source : Ar.Wikisource

[2] Al-Mizzî, Tahzib Al-kamâl (تهذيب الكمال), n°5822. Source :  ISLAMSPIRIT

2/ Ce qui a été dit au sujet de la fille de Muhayyisah :

ابنة محيصة ابن مسعود عن أبيها لا تعرف من الثالثة

Traduction :

[la chaine de transmission] "La fille de Muhayyisa Ibn Mas'oud selon son père" n'est pas connue de la troisième [génération].

(Cf. Ibn Hajar Al-'Asqalânî, (تقريب التهذيب), Bab An-Nisâ, n°8786. Source :AR.WIKISOURCE)

Dans l'introduction du même ouvrage nous lisons à propos de cette expression :

الثالثة‏:‏ الطبقة الوسطى من التابعين، كالحسن وابن سيرين‏.‏

Traduction :

"La troisième : La génération intermédiaire des Suivants [c'est-à-dire Suivants des Suivants] ; tels que Hassan ou Ibn Sîrîn."

Ce bout de la chaine de transmission est donc totalement inconnue des premières générations. Ce n'est que plus tard qu'Abou Daoud la rapportera comme l'explique le Hafiz Ibn Hajar (rahimulah). De plus, aucune information n'est disponible quant à la fille de Muhayyisah ; elle est totalement inconnue.

3/ Ce qui a été dit au sujet de l'esclave de Zayd Ibn Thâbit :

Nous allons rapporter ce que le cheikh Al-Albânî a dit au sujet de ce hadith et plus particulièrement sur l'esclave de Zayd Ibn Thâbit. Pour comprendre qui est l'esclave de Zayd Ibn Thâbit, il faut voir le hadith précédent dans les Sunan d'Abou Dawoud. 

Le cheikh Al-Albânî dit ceci :

Je dis : sa chaine de transmission est faible ; Muhammad Ben Abî Muhammad est inconnu comme l'a dit le Hafiz [Ibn Hajar] dans son Mizan : "il n'est pas connu". Et de plus, Ibn Hibban l'a mentionné dans ses "thiqât" (392/7) ! Et Adh-Dhahabî l'a affaibli dans son livre "Al-Kashif". 

Le cheikh continu et dit la même chose au sujet du hadiht qui nous concerne :

Je dis : sa chaine de transmission est faible à cause du fait que l'esclave de Zayd Ibn Thâbit est inconnu. Et il est Muhammad Ben Abî Muhammad comme il a été détaillé dans la chaine de transmission du hadith précédant celui là. [...]

[Al-Albânî, Da'îf sounan Abî Dawud, éditions 2002, Tome 10, p.430-431]

4/ Ce qui a été dit au sujet d'Ibn Ishâq :

Muhammad Ibn Ishâq Ibn Yasar (85-150/153 AH). Il s'agit du célèbre rédacteur de la toute première biographe du prophète (saws) connue. Son travail sera repris, abrégé et corrigé par Ibn Hishâm (cf. OUMMA). Beaucoup de critiques soulignent le fait que de nombreux récits contenus dans sa Sîra ne sont pas authentiques. L'imâm Mâlik, célèbre fondateur de la première école de droit islamique, ira même jusqu'à le traiter de "menteur parmi les menteurs" (دجال من الدجاجلة) pour avoir rapporté plusieurs histoires fausses sur le prophète (saws) (cf. Ibn Hajar Al-'Asqalânî, Tahdhîb At-Tadhzîb (تهذيب التهذيب), IX/51. Source : Wikisource) et an-Nasa'ï et Yahya ibn Ma'in en disent de même.

Nous traiterons insha'Allah dans un article proche la crédibilité qu'on doit accorder aux récits que l'on trouve dans la Sîra d'Ibn Ishâq (ou celle d'Ibn Hishâm). 

5/ Ce qui a été dit au sujet de Younouss :

De quel Younouss il s'agit ? En réalité il en existe plusieurs dans la littérature spécialisée. Cependant, à première vue il semblerait qu'il s'agisse de Younouss Ben Bakîr Ben Wâsîl Al-Shaybânî Abou Bakr. Il est considéré comme étant fiable malgré ses fréquentations (pouvoir et certains hérétiques).  

Ibn Hajar Al-'Asqalânî, Tahdhîb At-Tadhzîb (تهذيب التهذيب), chapitre sur la lettre "ya", n°745. Source : Wikisource

6/ Ce qui a été dit au sujet de Mousraf Ben 'Amrou :

    وأبو زرعة الرازي وقال كوفي ثقة وذكره بن حبان في كتاب الثقات قال محمد بن عبد الله الحضرمي مات سنة أربعين ومئتين [...]

Traduction :

[...] et Abou Zar'a Al-Râzî a dit que c'est un Koufî (habitant de Koufa en Irak) fiable. Ibn Hibbân l'a mentionné dans le livre des [transmetteurs] fiables [Kitâb Al-Thîqât]. Muhammad Ben 'Abd Allah Al-Hadramî a dit qu'il est mort en l'an 240.

Al-Mizzî, Tahdhîb Al-kamâl (تهذيب الكمال), n°5979. Source :  ISLAMSPIRIT

Après avoir analysé la chaine de transmission nous pouvons ajouter que le Cheikh Al-Albânî (Rahimahou Allah) considère le hadith comme étant faible dans son analyse du livre d'Abou Dawoud. Source : Dorar.net

Pour conclure nous pouvons résumer les choses selon le tableau suivant :

Tableau récapitulatif sur les transmetteurs du hadith

Note : Le terme "Daggal" signigie "menteur", mais dans la tradition islamique le terme est utilisé pour désigner l'antéchrist. Il apparait que ce terme a une connotation plus péjorative que celui de "menteur".

Réflexion personnelle : Comme l'a dit le cheikh Al-Albânî, le hadith est faible en raison de la présence de personnes inconnues dans la chaîne de transmission. Nous nous permettons cependant d'ajouter une autre irrégularité à celle-ci. Nous constatons que le temps séparant le décès de Younouss et de Mousraf Ben 'Amrou est de 61 ans. Sachant que dans les conditions de transmission du hadith, la puberté est exigée, il aurait fallu que Musraf ait entendu ce hadith à l'âge de 15 (âge de puberté pour les hommes en Islam) ans pour que son rapport soit acceptable. Ce qui nous fait une différence d'âge de 76 ans... En d'autres termes, il aurait fallu que Musraf ait rencontré Younouss alors qu'il avait 15 ans et que ce dernier ait eu 76 ans au minimum, ce qui nous semble étrange.

4         Analyse du texte du hadith – critique intrinsèque

 

Passons maintenant à l’analyse du matn (corps) du hadith :

 

أن رسول الله ‏ ‏صلى الله عليه وسلم ‏ ‏قال ‏ ‏من ظفرتم به من رجال ‏ ‏يهود ‏ ‏فاقتلوه فوثب ‏ ‏محيصة ‏ ‏على ‏ ‏شبيبة ‏ ‏رجل من تجار ‏ ‏يهود ‏ ‏كان ‏ ‏يلابسهم ‏ ‏فقتله وكان ‏ ‏حويصة ‏ ‏إذ ذاك لم يسلم وكان ‏ ‏أسن ‏ ‏من ‏ ‏محيصة ‏ ‏فلما قتله جعل ‏ ‏حويصة ‏ ‏يضربه ويقول يا عدو الله أما والله لرب شحم في بطنك من ماله ‏ 

  

Traduction :

« L’envoyé d'Allah a dit: "Si vous remportez une victoire sur les Juifs, tuez-les !" Alors Muhayyisa a sauté sur Shubayba, un marchand parmi les Juifs. Il avait d’étroites relations avec lui auparavant. Il le tua. A ce moment, son frère Huwayyisa n’avait pas accepté l’islam. Il était aussi plus vieux queMuhayyisa. Quand il a tué (le Juif), Huwayyisa l’a frappé, en disant: "Ô ennemi d’Allah, je jure par Allah, tu as sur le ventre un bon paquet de graisse qui vient de ses biens!" »

Autant le dire tout de suite, en plus de la faiblesse extrême de sa chaine de transmission, le hadith contredit le Coran, d'autres hadiths authentiques sur la question, ainsi que des faits historiques bien établis qu'il est impossible de nier.

 

 

4.1      Contradiction avec le Coran

 

Le Coran ne commande nullement de s'en prendre aux gens à cause de leur religion ou de leur race.

 

يا أيها الذين آمنوا كونوا قوامين لله شهداء بالقسط ولا يجرمنكم شنآن قوم على ألا تعدلوا اعدلوا هو أقرب للتقوى واتقوا الله إن الله خبير بما تعملون

Traduction approchée :

"Ô les croyants ! Soyez stricts (dans vos devoirs) envers Allah et (soyez) des témoins équitables. Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injuste. Pratiquez l'équité : cela est plus proche de la piété. Et craignez Allah. Car Allah est certes Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites."

[Saint-Coran, Sourate 5 verset 8]

 

Ce verset coranique contredit donc le fait que le Prophète (saws) aurait ordonné de tuer tous les Juifs.

Certains pourraient essayer de rétorquer que le verset de l'épée abroge celui-ci, or ceci est erroné comme nous l'avons montré dans notre article sur le Jihad en Islam.

ولا تجادلوا أهل الكتاب إلا بالتي هي أحسن إلا الذين ظلموا منهم وقولوا آمنا بالذي أنزل إلينا وأنزل إليكم وإلهنا وإلهكم واحد ونحن له مسلمون

Traduction approchée :

"Et ne discutez que de la meilleure façon avec les gens du Livre, sauf ceux d'entre eux qui sont injustes. Et dites : «Nous croyons en ce qu'on a fait descendre vers nous et descendre vers vous, tandis que notre Dieu et votre Dieu est le même, et c'est à Lui que nous nous soumettons»."

[Saint-Coran Sourate 29 verset 46]

 

ادع إلى سبيل ربك بالحكمة والموعظة الحسنة وجادلهم بالتي هي أحسن إن ربك هو أعلم بمن ضل عن سبيله وهو أعلم بالمهتدين

Traduction approchée :

"Invitez-les tous sur la Voie du Seigneur avec sagesse et par d'admirables prédications ; et discutez avec eux de la façon la plus honnête et la plus agréable ; car le Seigneur connaît le mieux ceux qui, écartés de son sentier, acceptent d’être guidés." 

[Saint-Coran, Sourate 16 verset 125]

وإن تكذبوا فقد كذب أمم من قبلكم وما على الرسول إلا البلاغ المبين

Traduction approchée :

"Et si vous criez au mensonge, d'autres nations avant vous, ont aussi traité (leurs prophètes) de menteurs. Au Messager, cependant, n'incombe que la transmission claire."

[Saint-Coran, Sourate 29 verset 18]

لست عليهم بمصيطر

Traduction approchée :

"et tu n'es pas un dominateur sur eux."

[Saint-Coran, Sourate 88 verset 22]

ا إكراه في الدين قد تبين الرشد من الغي فمن يكفر بالطاغوت ويؤمن بالله فقد استمسك بالعروة الوثقى لا انفصام لها والله سميع عليم

Traduction approchée :

"Nulle contrainte en religion ! Car le bon chemin s'est distingué de l'égarement. Donc, quiconque mécroît au Rebelle tandis qu'il croit en Allah saisit l'anse la plus solide, qui ne peut se briser. Et Allah est Audient et Omniscient."

[Saint-Coran, Sourate 2 verset 256]

وقل الحق من ربكم فمن شاء فليؤمن ومن شاء فليكفر إنا أعتدنا للظالمين نارا أحاط بهم سرادقها وإن يستغيثوا يغاثوا بماء كالمهل يشوي الوجوه بئس الشراب وساءت مرتفقا

Traduction approchée :

"Et dis : «La vérité émane de votre Seigneur». Quiconque le veut, qu'il croit, et quiconque le veut qu'il mécroie». Nous avons préparé pour les injustes un Feu dont les flammes les cernent. Et s'ils implorent à boire on les abreuvera d'une eau comme du métal fondu brûlant les visages. Quelle mauvaise boisson et quelle détestable demeure !"

[Saint-Coran, Sourate 18 verset 29]

4.2      Contradiction avec la Sunna authentique

Le hadith authentique suivant témoigne du mensonge de l'histoire d'Ibn Sounayna. Ce sont les mêmes acteurs [les Juifs + Muhayyisa + Huwayyisa + le Prophète (saws)] qui apparaissent dans ce récit et curieusement, il s'agit d'une situation ultérieure à celle des Banu Quraydha de laquelle aurait découlé l'ordre du Prophète (asws) de tuer tous les juifs, mais aussi le meurtre de sang froid commis par Muhayyisa.

Note : les numéro des ahadiths suivants sont tirés des éditions Al-Qalam.

Voici le hadith sahih:

- Bukhârî [hadith n° 7192]  rapporte que Isma'il nous a rapporté que l'Imam Mâlik m'a rapporté selon Abou Layla ibn 'Abdallah ibn 'Abd ar-Rahman ibn Sahl selon Sahl ibn Abi Hathma (al-Ansarî) qui l'informa avec d'autres parmi les notables de son clan que:

"'Abdallah ibn Sahl et Muhayyisa partirent pour Khaybar pour se détendre quelques peu. Muhayyisa fût informé que son compagnon 'Abdallah fut assassiné et jeter dans un fossé (ou près d'une source, le doute est du rapporteur). Il alla trouver des juifs et leur dit: "Je jure que vous l'avez tué ! Nous jurons que nous ne l'avons pas tué ! répondirent-ils". Alors il alla en informer les gens du clan de la victime. Puis il alla, accompagné de Huwayyisa (son frère aîné) et de 'Abd ar-Rahman ibn Sahl, voir le Prophète (sws). Muhayyisa voulait prendre la parole, puisque c'était lui qui était à Khaybar, mais le Prophète (sws) lui dit: « Au plus âgé de parler, au plus âgé de parler ! »

Ce fut donc Huwayyisa qui parla le premier ; Muhayyisa fut le second à prendre la parole. « Soit qu'ils versent le prix du sang de votre homme, dit alors le Messager de Dieu (sws) , soit qu'ils s'attendent à une guerre. » Ensuite, le Messager de Dieu (saws)  leur ayant adressé cette décision par écrit, les Juifs répondirent également par écrit : « Nous ne l'avons pas tué. »

Et le Messager de Dieu de s'adresser à Huwayyisa, à Muhayyisa et à ‘Abd er-Rahmân en ces termes : « Voulez-vous prêter serment pour avoir le droit contre votre homme ? [c'est à dire pardonner aux Juifs et renoncer au prix du sang] - Non, répondirent-ils - Voulez-vous que les Juifs prêtent serment ? - Ils ne sont pas musulmans ! » Le Messager de Dieu (saws) paya de ses biens le prix du sang en donnant cent chamelles qu'on fit entrer à l'intérieur de la maison des ayants-droit. Sahl dit que l'une d'elle lui donna un coup de patte."

La logique des choses veut que si l'histoire rapportée par Ibn Ishâq, Ibn Hishâm et Abou Dawoud soit véridique, ces acteurs n'auraient pas agit de la sorte. En effet, le Prophète (saws) aurait ordonner de tuer tous les Juifs. Cependant, dans ce récit ils agissent comme si l'ordre n'avait pas été donné ! Pire le prophète (saws) paie la dette pour eux ! 

Les deux frères Huwayyisa et Muhayyisa auraient du dire de les tuer sur le champs sans réfléchir (pourtant dans le récit, il n'est aucunement question de cela). Alors qui croire, un hadith authentique ou une histoire mensongère dans un hadith très défectueux et des récits sans chaîne de transmission ? La réponse est toute faite...

Ce seul point servirait à clore le débat ! Mais continuons avec d'autres preuves authentiques:

- Bukhârî [hadith n° 3167] rapporte que 'Abdallah ibn Youssouf nous a rapporté disant que al-Layth nous a raporté disant que Sa'id al-Maqbouri m'a rapporté selon son père, selon Abou Hourayra (raa) qui dit :

"Nous étions à la mosquée quand le Prophéte vint à nous et dit : "Allez aux Juifs !" Nous sortimes et allames à l'endroit ou ils étudiaient la Torah. Le Prophéte leur dit : "Embrassez l'Islam, vous acquerrez votre salut ! Sachez que la terre est à Dieu et à Son Prophéte, et que je veux vous chasser d'ici ! Celui qui, parmi vous, peut trouver un acquéreur à ses effets, qu'il les vende. Sachez que la terre est à Dieu et à son prophéte." 

(Note du traducteur : après les bani Qaynuqâ, les bani an-Nadir et les Bani Quraydha, des foyers juifs restèrent à Médine et à Khaybar et quelques éparses minorités. Le Prophéte (saws) reçut l'ordre divin de ne laisser en Arabie d'autres religions que l'Islam.)

Ce hadith permet de répondre aux accusateurs. Si le Prophète (saws) voulaient tuer tous les juifs, il en aurait profité à ce moment là pour les massacrer. Or, que voyons nous? Le Prophète (saws) explique aux Juifs qu'ils vont devoir quitter les lieux suite à l'ordre divin qu'il venait de recevoir. Rien d'autre... 

- Bukhârî [hadith n° 3169] rapporte que 'Abdallah ibn Youssouf nous a rapporté disant que al-Layth nous a raporté disant que Sa'id al-Maqbouri m'a rapporté selon son père, selon Abou Hourayra (raa) qui dit :

"Après la conquête de Khaybar, on (Zaynab bint al-Harith) offrit au Prophète (saws) du (gigot de) mouton empoisonné. "Convoquez moi les juifs qui sont là", dit le Prophète (saws)... Puis il leur dit: "Me direz-vous la vérité si je vous pose cette question" ? Oui dirent-ils. "Avez vous mis du poison dans cette viande" ? Oui dirent-ils. "Qui vous a poussé à agir ainsi" ? dit le Prophète (saws). Nous avons voulu nous débarrasser d'un faux prophète, si tu en étais un ! dirent-ils. Si tu es un vrai Prophète, le poisin n'aura pas d'effet sur toi."

Le Prophète (sws) ne les a pas fait attraper sur le champs ni mis à mort malgré qu'ils s'en soient pris à sa vie. Ce récit contredit encore une fois la déclaration du meurtre de tous les juifs en sa possession.

Bukhâri rapporte dans son livre de la Jizya et de la mouwada'a, bab 14, que Ibn Wahb rapporte en disant que Younous, m'a informé disant

"On interrogea ibn Chihab au sujet de quelqu'un parmi les ahl ad-dhimma qui en ensorcela un autre, faut-il le tuer ? Il répondit: le Prophète (saws) fut exposé à un cas similaire, mais il n'a pas tué celui qui a pratiqué la sorcellerie. Le sorcier était des gens du livre !"

Aucun meurtre à son encontre...On continue :

- Bukhârî [hadith n° 3166] rapporte que Qays ibn Hafs nous a rapporté disant que 'Abd al-Wahid nous a rapporté disant que al-Hassan ibn 'Amr qui dit: Moujahid nous a rapporté selon 'Abdallah ibn 'Omar (raa) qui dit:

"Le Prophète dit: Celui qui tue quelqu'un des ahl adh-dhimma, ne sentira pas l'odeur du Paradis dont le parfum s'exhale de la distance de quarante année de marche !" 

Le récit est clair, quiconque tue un juif ou un chrétien ou autre sous la responsabilité de la protection en tant que statut de Dhimmi (soumis au tribut) commet un acte très répréhensible et le Prophète (sws) va jusqu'à dire qu'il n'ira pas au Paradis (si bien entendu cette personne meurt sans s'être repenti sincèrement et n'est pas revenue sur sa faute), ce qui est d'une gravité extrême dans la vie d'un croyant.

Ce récit va dans le même sens que le hadith précédent, rien d'autre à ajouter.

- Bukhârî [hadith n° 6917] rapporte que Muhammad ibn Youssouf nous a rapporté que Soufyan nous a rapporté selon 'Amr ibn Yahya al-Mazini selon son père selon Abou Sa'id al-Khoudri qui dit:

"Un juif vint trouver le Prophète (sws) et lui dit: "O Muhammad ! un Ansarite de tes Compagnons m'a giflé." Le Prophète (sws) ordonna qu'on amenât l'homme et lui dit: "l'as tu effectivement giflé ?" Oh Envoyé de Dieu ! En passant devant un groupe de juifs je l'ai entendu dire: " Par celui qui a fait de Moïse (as) Son élu d'entre les humains ! ", alors prit de colère, je lui ai dit: "le préfères-tu à Muhammad ?" et je l'ai giflé. Le Prophète lui dit: "Ne me préférez pas aux autres Prophètes, car le Jour du Jugement, les gens seront foudroyés. Le premier qui en sera réveillé sera moi. Mais que verrai-je ! Moïse (as) cramponné au trône du Seigneur ! Je ne saurais s'il se sera réveillé avant moi ou s'il en aura été épargné pour l'épreuve qu'il avait déjà subie au Mont Tour !"

Pourquoi a-t-il convoqué le musulman qui gifla ce juif plutôt que de le faire tuer ou encore de l'ignorer ? C'est bien là la justice parfaite du Messager de Dieu (saws).

- Bukhârî [hadith n° 2251] rapporte que Muhammad ibn Salam nous a rapporté disant que Ya'la nous a rapporté disant que al-A'mach nous a rapporté selon Ibrahim selon al-Aswad selon 'Aicha (raa) qui dit:

"Le Prophète (sws) acheta à un juif une denrée alimentaire à crédit, et lui remit comme garantie sa cuirasse de fer (ou côte de maille)"

Comment le Prophète fait-il pour mettre son matériel en gage chez un juif au lieu de le mettre à mort ? De plus cet homme sera encore vivant après la mort du Prophète (saws) ce qui est totalement contraire au récit de tuer les juifs. 

 -  Zayd ben Sa'na, un savant juif de Médine, vint au Prophète (sws) exiger sa créance. Il lui tira l'habit de son épaule, le prit au col brutalement et lui dit avec dureté : 

"Vous, les Bani 'Abdul-Muttalib, vous atermoyez (tumâtilûn) vos dettes !" 'Omar (raa) alors, le réprimanda et durcit le ton. Le Prophète (saws) sourit et lui dit : "Moi et lui, nous avions plus besoin d'autre chose de ta part, oh 'Omar : que tu me recommandes de bien régler ma dette, et que tu lui recommandes de réclamer son dû de bonne façon". Puis il ajouta : "Il reste (en fait) au terme (de la dette) trois (jours)". Et il ordonna à 'Omar de le payer et de lui donner en plus vingt mesures " sâ' ", pour l'avoir effrayé. 

Ce fut la cause de l'entrée à l'islam de cet homme qui disait : "Il ne manquait aucun signe parmi les signes de la Prophétie de Muhammad (saws), que je ne reconnus, sauf deux : sa magnanimité prime sa colère et le surplus d'emportement aveugle ne fait qu'ajouter à sa magnanimité. Ainsi, je l'éprouvai avec cette histoire "de dette''. Et je le trouvai alors, tel que décrit (dans les anciens livres). Quand à ma dette, donnez la aux pauvres parmi les musulmans" . (Rapporté par Ibn Hibbân (1/521)

Un juif attrape le Prophète (sws) par le col et le secoue dans tous les sens, pourquoi le Prophète (sws) sourit-il au lieu de demander à 'Omar (raa) de le mettre en pièce sur le champs ? Non, il demande à ce que la dette soit régler dans les temps convenus et ajoute un surplus pour le malentendu qui se déroula et l'énervement de cet homme juif.

 - At-Tirmidhî [hadith n° 1943] et Abou Dawoud [hadith n° 5152] rapportent qu'un jour, on a tué un mouton chez ibn 'Omar (raa). En arrivant dans sa maison il [Ibn 'Omar] demanda aux gens de sa famille : Avez-vous offert une part à notre voisin juif ? Avez-vous offert une part à notre voisin juif ? - deux fois. J'ai entendu l'Envoyé d'Allah (saws) dire : 

"(l'Ange) Jibril (as) (Gabriel) n'a cessé de me faire des recommandations au sujet du voisin, au point que j'ai cru qu'il allait l'imposer comme héritier." 

Un voisin juif qui vit encore ? Subhanallah ! Et de plus, le musulman insiste pour qu'il soit nourrit de sa propre nourriture. N'est-ce pas là encore une fois une preuve de clémence et de tolérance des musulmans qui se rappellent les enseignements de leur Prophète (saws)?

Et cerise sur le gâteau, le petit cadeau de la fin:

Bukhâri [hadith n°2617] rapporte qu'une juive apporta un mouton empoisonné au Prophète (sws) qui en mangea. Elle fut ensuite amené au Prophète (saws) et on lui demanda: "devons nous la tuer ?" Il dit "non". J'ai continué à voir l'effet du poison sur le palais de la bouche de l'Apôtre de Dieu (saws)."

Plusieurs versions contradictoires de cette histoire existent, mais ce n'est pas le moment d'en parler. Se référer au sujet en question pour plus d'informations. Le plus important est qu'une femme tenta de tuer le Prophète (saws), une juive, et pourtant le Messager (saws) ne la pas faite tuer pour le dommage qu'il a subi.

Certaines versions de ce hadith disant qu'elle fut tuée par la suite non pas pour ce que le Prophète (saws) éprouva avec l'empoisonnement, mais parce que l'un des hommes qui mangèrent de ce mouton mourut sur le champ. Loi du talion oblige, elle fut tuée. Mais les versions sont contradictoires et nous le verrons lors de l'analyse de ce cas dans un prochain article insha'Allah.

- Bukhârî [hadith n°2338] rapporte que 'Omar Ibn al-Khattâb chassa les Juifs et les Chrétiens de Hedjaz, dit 'Abdallah Ibn 'Omar. Quand le prophète (saws) conquit Jaybar, dit 'Omar Ibn al-Khattâb, il voulu en chasser les Juifs ; leur terre ayant échu à Dieu, à Son Prophète (saws) et aux musulmans. Il voulut mettre cela à exécution, mais les Juifs sollicitèrent la faveur de les laisser travailler la terre (en métayage) contre la moitié de ses fruits. Le prophète (saws) leur dit : "Nous vous maintiendrons autant que nous le voudrons !" Alors ils restèrent jusqu'au jour où 'Omar mit fin à ce contrat et les expulsa à Taymâ' ou à Arîhâ (Jéricho).

Mêmes remarques que précédemment : Si le prophète (saws) voulait tuer tous les Juifs et si l'Islam commandait la mort de tous les Juifs, il est vraiment étonnant de le voir se comporter de la sorte ! Ce récit prouve que durant tout son apostolat prophétique, il ne s'en ai jamais pris à ceux des gens du Livre qui respectaient leurs engagements.

4.3      L'histoire méconnue des Juifs de Khaybar ... 5 siècles après l'Hégire !

L'authenticité de ce hadith ne tient plus la route quand on étudie un tant soit peu la réalité historique. Si le prophète (saws) avait réellement prononcé ces mots "tuez tous les Juifs qui tomberont en votre pouvoir", il est tout de même intéressant de noter que jusqu'au 5ème siècle de l'Hégire, des Juifs vivaient toujours à Khaybar. 

 

"Les juifs de khaybar (conquis par le Prophète (sws) à la 7ème année de l'hègire) vinrent réclamer à un calife du 5ème siècle de l'hégire l'annulation de l'impôt qu'ils payaient en raison de leur statut et ils produisirent pour preuve un document signé par le Prophète (sws) et datant de la 7ème année de l'hègire. Lorsque le calife demanda au grand historien al-Khatib al-Baghdadi d'authentifier le document, il le rejeta sur le champ. Il affirma que, d'une part, les deux noms cités dans le document ne pouvaient pas être avec le Prophète (sws) cette année là. L'un d'eux, Sa'd ibn Mu'adh était mort deux ans auparavant (5ème année de l'hègire) suite à une blessure, et l'autre, Mu'awiya ibn abi Sufyan ne s'était converti qu' à la 8ème année. D'autre part, ce type d'impôt (al Jizya) n'était pas encore institué à la 7ème année, il ne le sera que deux ans plus tard. Le document fut à l'évidence rejeté."

(Dr. Abdelmadjid Ihaddadene, "Introduction aux sciences du hadith", édition Le Relais 2009, p.127-128)

 

Bien que le document présenté par les Juifs se soit révélé faux et mensonger, cette histoire montre une chose : qu'il y avait des Juifs à Khaybar jusqu'au moins le 5ème siècle de l'Hégire. Ce fait historique contredit tout simplement le fait que le Prophète (saws) ait pu dire qu'il fallait tuer tous les Juifs. Si cela avait été le cas, il est étonnant de voir les premiers Califes ne pas exécuter cet ordre ! D'autant plus qu'on connait la Foi qu'avaient les premières générations envers les paroles du Prophète (saws).

5         Compléments sur le hadith

 Muhammad Hamidullah (Rahimahou Allah) ainsi que Tariq Ramadan rapportèrent quelques précieuses informations sur ce sujet que nous nous pressons de mettre par écrit au lecteur: 

"Point 939: Il parait selon nos sources que tous les membres des Banu Qaynuqa furent expulsés. Mais on les rencontres toujours à Medine en petit nombre certes, dans les temps postérieurs. Par exemple Ibn Sa'd rapporte que 4 mois après leur départ supposé, lors de la bataille d'Uhud, " Le Prophète (sws) demanda : qui sont ces gens (qui sont venus combattre à nos coté) ? On répondit: C'est 'Abdallah ibn Ubaiy ibn Salul, avec 600 de ses alliés parmi les juifs de Qainuqa, clan de 'Abdallah ibn Salam. Il demanda: ont ils embrassé l'Islam? On dit : non. il refusa alors leur aide", mais ils se trouvaient bien là.

D'aucuns racontent que deux ans après, lors de la bataille du Fossé, ils vinrent en aide au Prophète (sws) et combattirent même contre les juifs des Banu Quraydha, au coté des musulmans. Baihaqi mentionne qu'en l'an 7, lors de l'expédition de Khaybar, les juifs des banu Qainuqa rendirent d'utiles services aux musulmans, et le Prophète les récompensa par des cadeaux."

"Le Prophète d l'Islam, sa vie, son oeuvre", Muhammad Hamidullah, édition al-Falah 2009, p.447

"Point 954: Les juifs qui restèrent à Médine semblent avoir renoncé définitivement à toute activité politique anti-musulmane, et s'être contenté de faire du commerce. Ils n'eurent jamais à se plaindre du Prophète (saws): il les traita avec bienveillance, et alla jusqu' à leur accorder des dons annuels à titre permanent. Nous avons le texte d'une charte, où il avait octroyé des quantités considérables de denrées alimentaires aux juifs des Banu 'Uraid... Il y avait de riches commerçants juifs à Médine en l'an 10 de l'hégire. Le Prophète Muhammad (saws) ayant alors fait cadeau d'un précieux vêtement à son oncle 'Abbas, celui-ci le vendit à un juif pour 8000 dirhams. Lorsque le Prophète Muhammad (saws) mourut en l'an 11 de l'hégire, sa cotte de maille se trouvait hypothéquée chez un juif, marchand à Médine (rapporté par al-Bukhari, 34/87, et l'Imam Ahmad, hadith n°2724), appelé Abu ach-Chahm et appartenant comme client aux Banu Zafar."

"Le Prophète d l'Islam, sa vie, son oeuvre", Muhammad Hamidullah, édition al-Falah 2009, p.455

"Ainsi quelques années plus tard, alors même que les musulmans étaient en conflit larvé avec une tribue juive dont ils soupçonnaient le double jeu et la trahison, un musulman crut possible de s'innocenter d'un vol qu'il avait commis et d'en reporter la faute sur un juif. La Révélation, sur huit versets (Sourate 4 du verset 108 au verset 116), vint dénoncer la grave manipulation du coupable musulman en révélant l'innocence du juif. Les propos à l'endroit du musulman sont explicites: 

"Celui qui commet une faute ou un péché puis en accuse un innocent, celui-là est coupable d'une infamie et d'un péché grave". (Sourate 4,112)

"... Pendant des années, un jeune juif sera son compagnon (au Prophète saws) et le suivra partout, tant il aimait être dans la compagnie du Prophète (saws). Ce dernier ne lui demanda pas de renoncer à sa foi. L'enfant tomba gravement malade, et c'est sur son lit de mort qu'il demanda à son père l'autorisation de pouvoir se convertir à l'Islam, alors que, pendant toutes ces années au coté du Prophète (saws), il avait pu rester ce qu'il était et témoigner et recevoir de l'amour et de l'affection de Muhammad (saws).

Plus tard, alors qu'il se trouvait avec un groupe de musulmans, une procession funèbre passa à proximité et le Prophète (saws) se leva afin de témoigner son respect pour le défunt. Surpris, les musulmans l'informèrent qu'il s'agissait du décès d'un juif, et le Prophète (saws) leur répondit de façon claire et digne: "Ne s'agit-il pas d'une âme humaine ?"

Le respect était le même et allait le rester malgré les difficultés, les trahisons et les guerres: la non-imposition de la conversion, le respect de la différence et l'égalité de traitement. Ceci est le coeur du message fondamental de la Révélation et de l'action de son Prophète (saws)."

"Muhammad, vie du Prophète, les enseignements spirituels et contemporains", Tariq Ramadan, édition Presses du Châtelet 2006, p.137-139

Il est important de mentionner l'alliance qui fut faite entre les musulmans et les juifs à Médine et dont les conditions étaient claires et allaient pour le bien et la tolérance des deux groupes:

Le pacte avec les juifs de Médine:

Les Juifs disposaient donc d'une représentation propre de leur peuple, d'un gouvernement exécutif (obéissant néanmoins au Chef d'Etat Muhammad (saws)) et d'un pouvoir judiciaire propre.

Source

En français : http://eveil-de-l-ame.net (section "La Sunna" puis onglet "La constitution de Médine")

En arabe : www1.umn.edu/humanrts/arab/IS-1.html

Rappelons aussi que le Prophète (saws) avait un voisin juif, qui déversait chaque matin des ordures devant sa maison. En, sortant, le Prophète (saws) enlevait ces ordures, sans faire le moindre reproche à son voisin.

Un jour, en sortant de chez lui, le Prophète ne trouva pas d'ordures. Il alla s'enquérir de son voisin juif. On lui dit qu'il était malade et alité.

Le Prophète (saws) alla donc lui rendre visite. En le voyant, le juif eut peur, il croyait qu'il venait lui faire du mal, ou se venger de lui. Mais notre bien-aimé Prophète (saws) l'apaisa et lui expliqua qu'il venait juste le soutenir dans sa maladie et lui apporter du réconfort. Touché par ce geste, le juif se convertira à l'islam... Tels étaient les caractères du Prophète de Dieu (sws).

Nous pouvons également citer cet enseignement émouvant du deuxième khalife de l'Islam, 'Omar ibn al-Khattab (raa) (surnommé al-Farouq):

"Un jour 'Omar Ibn al-Khattab (raa) vit un vieillard mendier une aumône dans la rue. 'Omar lui demanda qui il était et apprit qu’il était juif. 'Omar le prit par la main jusque chez lui, lui donna à manger et de l’argent et l’envoya à la Trésorerie Musulmane, en disant : « Donnez de l’argent Islamique à cet homme. Est-il juste de lui exiger de l’argent (la Jizya) quand il est jeune et de l’abandonner quand il est âgé ? Ceci n’est pas possible en Islam. »

Il n'y a pas lieu de tergiverser plus longtemps, car il est clair que l'Islam enseigne la bonté envers les juifs justes et innocents de tout acte malveillant à son égard.

6         Analyse des versions rapportées par Ibn Ishâq et Ibn Hishâm

Notons déjà que la version d'Ibn Hishâm contredit celle d'Ibn Ishâq et que l'expression "tuez tous les juifs qui sont en votre pouvoir" ne se retrouve nullement dans son texte. Nous pouvons même ajouter qu'Ibn Ishâq ne situe même pas le meurtre d'Ibn Sounayna au même moment qu'Ibn Hishâm. Pour le coup, les missionnaires chrétiens nous ont tendu tout seul le bâton pour se faire battre.

Ibn Hisham contredit la version de Ibn Ishaq, car pour Ibn Ishaq c'est ibn Sounayna qui fut tué alors que pour Ibn Hisham, c'est Ka'b ibn Yehouda, ce qui en dit long sur la véracité de cette histoire. Le récit même est complètement différent en lisant les 2 histoires :

En effet, dans l'une, c'est le Prophète (sws) qui ordonne à deux personnes de le tuer d'une certaine manière, s'ensuit alors la conversion du frère.

Tandis que dans l'autre version, c'est une déclaration du Prophète (sws) à l'encontre des juifs qui est la cause du meurtre perpétré par un seul homme, s'ensuit alors la conversion de son frère à l'Islam.

A partir du moment où ces deux récits sont contradictoires, on ne peut même pas en tenir compte selon toute logique. En effet,  pour valider un fait historique, il faut tout de même s'entendre sur l'époque et les personnes impliquées, et c'est la  moindre des choses.

Finalement, le hadith rapporté par Ibn Ishâq dans lequel le Prophète (sws) aurait demandé de tuer tous les Juifs est déclaré "faible" par le cheikh Al-Albânî (Source : Al-Sîra Al-Nabawiyya, de Muhammad 'Ali Samak, Tome 3, p.12)

7         Conclusion

 

Pour conclure sur ce hadith, nous pouvons affirmer que le prophète (sws) n'a jamais ordonné de tuer Shubayba Ibn Sunayna, ni qu'il faille tuer tous les Juifs pour les raisons suivantes : 

 

- Le Hadith d'Abou Dawoud (dans lequel se trouve Ibn Ishâq) et celui rapporté par la Sira d'Ibn Ishâq est faible

- Cette histoire contredit le Coran

- Cette histoire va contre les Ahadith Sahih (authentiques)

- Ce fait contredit l'Histoire des musulmans

Toutes les preuves citées plaident en faveur du fait qu’il ne faut pas retenir ledit hadith. Ceci est notre dernier mot sur la question.

Fin de citation. 

Allahou A’lam !