Le génocide des îles Canaries préambule à celui des Amérindiens

I. 5/. L'ÉGLISE, BOUCLIER DES INDIENS :

j)Le génocide des îles Canaries préambule à celui des Amérindiens.

La lutte des ecclésiastiques fut la suite de celle qu'ils avaient mené au siècle précédant aux îles Canaries contre les chasseurs d'hommes de l'Europe du nord des Pyrénées. Les malheureux habitants de ces îles, les Guanches, furent assaillis dès 1402 par l'aventurier normand, Jean de Bethencourt, seigneur de Saint-Martin le Gaillard, Grainville-la-Teinturière et autres lieux en Normandie, dont les teinturiers connaissaient et appréciaient le bois rouge qui valait le brésil (bois couleur braise) pour la teinturerie (1). Pas besoin de faire un dessin sur les prétendus élans prosélytiques chrétiens de Jean de Bethencourt. Les Normands semèrent la désolation et la dévastation dans les îles Canaries, moins à la recherche de bois rouge qu'à la chasse à l'homme pour les marchés d'esclaves d'Espagne. Le métier de chasseur d'hommes fut mené par la suite par Maciot de Bethencourt, neveu de Jean, avec encore plus de traîtrise pour attirer les victimes dans des pièges, qu'usa l'oncle et ses compagnons Gadifer de La Salle et Bertin de Berneval. 

Bethencourt s'était arrangé avec la Cour d'Espagne (2) pour jouer au conquistador aux Canaries sous prétexte de "christianiser" les Guanches. Ce fut là le prélude de ce qui allait se passer un siècle plus tard au Nouveau Monde : mise en esclavage des aborigènes, et lutte de l'Eglise pour les libérer, dans la mesure où elle pouvait prouver que ces hommes arrachés à leurs terres par la chasse à l'homme n'étaient pas des esclaves pris en "guerres justes", mais les victimes de bandits. Cette attitude de l'Eglise était au fond son MEA CULPA, car elle s'était laissée d'abord prendre au piège de la "christianisation", et ne se reprit qu'après s'être aperçue de la supercherie. 

Les Normands furent suivis par d'autres "christianisateurs", Portugais et Espagnols, ce qui provoqua des hécatombes parmi les Guanches, l'effacement de la face du monde de leurs langue et Culture ainsi que de presque tous leurs représentants. Ce fut une impitoyable extermination, qui préfigura celle des Indiens. On se "fit la main" sur les Guanches. 

Lors de la deuxième moitié du XVme siècle, l'intérêt de l'Eglise espagnole pour défendre les Guanches commença à coïncider avec celui de la Couronne d'Espagne, qui, après l'annexion des îles Canaries ne voulait plus qu'on extermine ses nouveaux sujets. Ainsi l'Eglise, forte désormais de l'appui de la Couronne, faisait parcourir l'Espagne par ses évêques Juan de Prias et Juan de la Sema à la recherche d'esclaves Guanches vendus "illégalement", c'est à dire pris à la chasse à l'homme, dans le but de les ramener chez eux. 

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1/. Joaquin Blanco, HISTORIA DE LAS ISLAS CANARIAS, Las Palmas de Gran Canaria, 1957, pages 40 et suivantes. 

2/. Auprès de laquelle son oncle Rubin de Bracamonte était chez-lui. 

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