Dossier tabou sur M6, ou Bernard en Musulmanie

Dossier tabou sur M6, ou Bernard en Musulmanie

29/09/2016

 

 

Après un rude été passé sous le signe du burkini et des agressions faussement islamistes de femmes en short. Après la voilophobie de Mr Valls faisant les grosses lignes du New York Times et l’étude Montaigne sur les musulmans de France. Après les déclarations journalières de nos politiciens en campagne dignes de la IIIème République et la sortie du livre d’Eric Zemmour, vous pensiez que le monde médiatique allait laisser à l’islam et aux musulmans un brin de repos? Que nenni.

 

Ce mercredi soir, Bernard de la Villardière nous a fait le bonheur de nous présenter le premier numéro de son nouveau rendez-vous sur M6 : Dossier Tabou. Un sujet tabou, enfin! On commençait à croire le milieu du journalisme mainstream un brin trop obstiné ces derniers temps sur une certaine question, plutôt que sur d’autres.

Des sujets tabous, on peut estimer qu’il y en a pléthore. Des incroyables dégâts sanitaires provoqués par Monsanto et ses amis, aux dessous de la guerre civile en cours au Congo ; des filières pédophiles transnationales mêlant politiciens et grands patrons, à la financiarisation de l’Europe soumise au diktat des banques, du tabou, et intéressant, il y en a à revendre.

Mais le sujet qu’M6, Bernard et son équipe aura estimé tabou, n’aura été rien d’autre que celui de l’islam et des musulmans… Répétez-moi ça? Oui, l’islam et les musulmans, vous savez, ce sujet dont on vous parle à longueur de journée depuis maintenant plusieurs années sur fond de bombes et de mosquées clandestines, de jihadistes et femmes voilées. Vous trouviez que les journalistes, politiciens et intellectuels en parlaient trop, que l’idée du grand remplacement était déjà largement écumée ? Non, Bernard n’est pas de cet avis. L’islam en France, l’UOIF et la femme voilée sont des sujets tabous, on n’en parlerait pas assez. Mais fort heureusement, Bernard en parla.

A l’instar de cet aventurier traversant l’Afrique un siècle plus tôt en compagnie de quelques dociles porteurs de bagages, le voyage qu’effectuera Bernard en Musulmanie s’est fait riche en propos, propositions et constats des plus ridiculement affligeants.

Retour sur une immersion paternaliste et islamophobique dans le quotidien des musulmans de France.

 

Bernard, les voilées et la laïcité

Un sujet sur l’islam ne peut évidemment, en France, s’imaginer sans traiter le cas du voile de ses dames. S’appuyant sur les chiffres récents de l’étude commanditée par l’Institut Montaigne, Bernard met en avant le grand nombre de femmes musulmanes qui seraient donc favorables au voile et notamment au port du niqab. Des femmes en niqab, il en croisera d’ailleurs, au salon du Bourget, organisé par l’UOIF, lorsqu’il sera filmé en train d’échanger avec quelques jeunes femmes en hijab et jilbab. C’est interdit rappellera-t-il à ses interlocutrices qui cherchent à lui intimer de la laisser tranquille. Les échanges sont néanmoins cordiaux et le micro sera en l’espace de quelques secondes tendu aux premières intéressées que l’on entend d’ailleurs trop peu souvent. Il se laissera même invité par la comique Samia Orosemane dans son domicile familial autour d’un bon tajine. Voilée à la cool, aux côtés d’un père peu réjouit de voir sa fille donner de tels spectacles, elle saura néanmoins avec humour lui rappeler quelques notions simples et renverser quelques clichés un brin collants.

Jusqu’ici, nous ne dirons pas que tout va bien, mais pire, il y a déjà eu.

Les différents voiles passés au crible, l’interview du généreux Rachid Nekkaz, les motivations des unes et des autres mises en lumières, du voile nous passons tout logiquement à la laïcité, et c’est dans les hôpitaux publics qu’il se rendra afin d’en constater les entorses effectives.

Depuis un certain temps, la laïcité post-2004 a fait son entrée dans les hôpitaux, une jolie charte l’explicitant. Le voile n’y est pas (encore) interdit pour les patientes, mais n’espérez plus vous faire examiner par un médecin de votre sexe en cas d’urgence, non, le demander, c’est désormais interdit. De laïcité il sera aussi question lorsque le cas de ce jeune homme barbu « à la façon des islamistes« , sera mis en avant, qui face à l’impératif, préférera quitter son stage et l’établissement plutôt que de tailler sa barbe. L’enquête se poursuivra jusque dans le quartier voisin à la recherche de barbus toujours « à la façon des islamistes », sommés de se justifier quant à la motivation religieuse ou non de leur acte.

Mais au fait, de quelle laïcité parle-t-on? Nul article ne fait mention d’une taille de barbe à respecter dans la loi de 1905 en l’occurence. Bernard, citant souvent la laïcité sera d’ailleurs très discret quand aux articles de loi qui la compose. Il nous parlera certes de l’article 2, imposant à l’Etat de notamment ne reconnaître aucun culte, mais comme tout fanatique laïque ne dormant plus à l’idée d’une France remplie de signes ostentatoires d’appartenance religieuse, il ne citera jamais l’article premier, garantissant, lui, la liberté de culte aux citoyens. Car évidemment, si l’on part du principe où la liberté de culte, comme la liberté de conscience et d’expression serait garanti dans ce pays, le reportage n’aurait absolument plus lieux d’être. Quid de qui respecte le mieux la loi..?

Il se rendra ensuite dans un établissement scolaire public, où la caméra suivra un proviseur faisant chaque matin la chasse aux couvres chefs divers et variés, s’attristant de savoir ces jeunes élèves musulmanes subir pressions et intimidations en dehors de son Temple laïque afin qu’elles se couvrent les cheveux. Nous ne nous arrêterons pas sur ce passage tant sa seule vision est symbolique de cette France qui se crispe et chasse la moindre parcelle de tissu couvrant la tête de ses citoyennes de manière si maladive… Une France s’imaginant une véritable police religieuse exerçant dans les rues de quartiers dits sensibles. Une France qui devra nous expliquer comment cela se fait-il qu’il y ait donc encore tant de femmes les cheveux au vent, quand ce n’est pas plus, dans ces mêmes quartiers…

 

Bernard au bal des idiots utiles 

Parler d’islam implique évidemment de donner la parole à ses dignes représentants, et quels plus dignes représentants que Abdelali Mamoun et Farid Darouff? La question ne se pose même pas… Bernard les présente comme des imams « modérés », républicains, et ouverts au vivre ensemble. Bernard tiens aussi à préciser que seuls les salafistes et intégristes ne voudraient pas de ces doux bonshommes. Ah bon? Mince alors.

Si avoir donné un temps de parole à l’imam de Montpellier, Mohamed Khattabi, (assumant d’ailleurs complètement ses propos) est chose louable, peut-être faudrait-il ré-expliquer à notre journaliste, sûrement mal entendant, que prendre ces deux premiers individus cités plus haut comme imam et voix représentatives des musulmans français, c’est un peu comme considérer Vanilla Ice comme un symbole de la culture Hip Hop, ou Nicolas Sarkozy comme un homme intègre. Ça n’a aucun sens, c’est décrédibilisant pour l’interviewer, et c’est prendre les gens pour de sombres imbéciles.

Farid Abdelkrim

Mais il y a mieux encore. Plus tard, lorsqu’il s’agira de traiter de l’UOIF, ce n’est rien de moins qu’à l’ex frère musulman Farid Abdelkrim, que Bernard posera des questions. Auteur de torchons des plus anti-musulmans, calomniant devant caméra l’imam Ahmed Miktar, en balançant à l’antenne que ce dernier serait, entre autre, polygame, Bernard n’a rien trouvé de mieux que ce personnage niant au passage l’islamophobie – pour parler des dessous de l’UOIF. Dans un même élan, lorsqu’il s’agira de diaboliser une fois de plus le Lycée Avéroès, ce n’est rien de moins qu’au condamné pour « diffamation non publique et injure non publique » à l’égard de ses anciens collègues du même établissement, Soufiane Zitouni, que l’émission tendra son micro. L’ancien professeur et merveilleux agent du crif qu’il ferait, persiste et signe, l’antisémitisme et l’islamisme radical gangrèneraient l’établissement.

Peu avant la fin du reportage, c’est vers l’élu socialiste Amine al Khatmi, l’un de ces musulmans de sa majesté tout droit sortis de la belle époque du colonialisme, que Bernard se tournera. Le bougre s’est fait connaître en s’attaquant à la seule élue voilée de France, à Argenteuil. Il gagna ensuite le respect des socialisto-laïcistes en s’alignant sur les positions de Laurence Rossignol et Manuel Valls sur le voile et la visibilité musulmane. Menacé par la muslimosphère, il l’est tout autant des fachos et identitaires. Instant émotion, l’apprenti socialiste nous lit les messages de haine qu’il reçoit de ces derniers, lui reprochant de chercher à se faire « plus blanc que le blanc », et de trop jouer à l’arabe de service. Comme quoi la vérité ne sort pas que de la bouche des enfants…

Amine el Khatmi

Mais revenons au coeur du sujet, qui semble gêner Bernard plus que toute autre chose : l’UOIF.

 

Bernard et l’UOIF

L’UOIF est dépeinte dans ce reportage comme une organisation secrète, cherchant à instaurer de manière insidieuse la chariah aux français, tirant ses références directement chez les Frères Musulmans. Bernard de la Villardière si soucieux de voir émerger cet islam de France compatible avec les valeurs de la République, semble ainsi continuer à voir en une organisation dont le parti pris pour la démocratie et les valeurs républicaines semble d’années en années des plus avérés, une organisation d’islamistes endurcis. Ça en serait presque drôle.

Pointant du doigt les relations qu’aurait son président Amar Lasfar avec certains prédicateurs, l’idée d’une invasion frériste de l’Europe est vendue au téléspectateur d’une façon des plus grossières. Bien sûr homophobes et antisémites, les pontes de l’UOIF chercheraient à mettre en pratique leur plan caché à travers la création d’une élite musulmane française. Un plan si caché qu’Amar Lasfar avouera sans aucune gêne dans la courte interview qui lui sera accordée. D’ailleurs, pardonnez-nous Bernard, mais n’est-ce pas l’objectif de toute communauté, surtout si minoritaire, que de permettre à sa descendance d’espérer meilleur avenir dans un pays dans lequel ils souhaitent s’implanter? N’est-ce pas même une preuve de leur volonté réelle de « s’intégrer » ? Sa crainte est néanmoins toute normale. Les antisémites, (les vrais), craignaient eux aussi fut un temps de voir les juifs s’organiser et gravir l’échelle sociale. Maintenant que c’est chose faite chez ces derniers, nous ne les entendons étrangement plus trop…

Bref. Le salon du Bourget, occupé chaque année par l’UOIF est bien entendu mis en image sous son jour le moins vendeur et le plus scandaleux. On y rappelle les nombreux appels au boycott de l’entité israélienne (ils sont antisémites, il faut le rappeler) les support à la Palestine et la venue du « sulfureux » Tariq Ramadan. Ce dernier y est présenté comme un anti-républicain jouant subtilement avec les mots et surtout la loi. L’auteur de « L’islam, la réforme radicale« , un antirépublicain ? Ça confirme ce que l’on pensait déjà, le musulman aura beau adhérer, publiquement, aux idéologies progressistes les plus marquées, ça ne sera semble-t-il jamais suffisant. Passons.

Après le salon, c’est bien évidemment vers les écoles UOIFistes que Bernard se tournera. En ligne de mire, le Lycée Avéroès cité plus haut.

Ses bons résultats, la venue en conférence d’intellectuels et journalistes divers et variés, tel que Pascal Boniface ou Pierre Tevanian, ses professeur(e)s non-voilées, les cours de musique ou d’éducation sexuelle faisant partie du programme? Non, pas assez intéressant pour nos charognards islamivores. Il faut de la polémique, du croustillant. Il sera ainsi question d’intervenants (encore) issus des frères musulmans, (encore) homophobes et (encore) antisémites ; de l’interview de l’ancien professeur Mr Zitouni, mythomane et calomnieur à ses heures, et de quelques images d’adolescentes voilées filmées à travers les grilles de l’établissement (un classique du reportage sur l’islam).

L’acharnement dure plusieurs minutes. En dépit de pouvoir l’attaquer sur ses résultats ou d’interroger des anciens élèves, ce qui aurait été le plus révélateur, Bernard se contentera de mettre en lumière ce qui sera le plus susceptible d’irriter la ménagère. Le refus du personnel de l’établissement à voir ses caméras entrer ont peut-être joué sur la susceptibilité de notre grand reporter…

 

Bernard à Sevran

Ville connue pour sa délinquance et mise récemment en son et images à travers l’oeuvre du rappeur Kaaris, Sevran est aussi connue pour ses multiples départs de jihadistes au Sham. De jeunes loups qualifiés sans surprise de salafistes, endoctrinés par de vilains salafistes dans une mosquée… salafiste. Interrogeant l’imam responsable de la dite mosquée, Bernard et ses caméras se font soudainement repérer et pris à parti par un groupe de jeunes de la cité. L’instant est mémorable. Plus mémorable encore, les propos en voix off de Bernard. Les jeunes, joint à la main, jogging et capuche, injurieux et à la main légère seraient… on vous la donne en mille… un mélange de dealers, et de salafistes (!!!). Une nécessaire clarification terminologique semble plus qu’avenue.

Faisant le tour du Web, son « agression » n’a pourtant rien d’exceptionnel. Combien de fois journalistes ou employés municipaux furent la cible de jeunes énervés dans ce genre d’environnement ? Quand l’on ne met les pieds dans les quartiers « sensibles » que pour mieux en diaboliser ses habitants, que ce soit au nom de la lutte contre la délinquance ou le radicalisme musulman, il faut s’attendre à ce que certains, las de se voir peints en horreur à longueur d’émissions, puissent en avoir gros sur la patate. Surtout quand il s’agit de venir empiéter sur le territoire de vendeurs et receleurs en tous genres…

Cherchant la « petite bête » comme le dit plus tôt Amar Lasfar, Bernard ira jusqu’à faire tourner en bourrique le maire écologiste de la ville avec ses questions abrutissantes. Ayant « aperçu » au détour d’une rue une école musulmane privée, il interpellera ce dernier sur le voile porté par les jeune filles entrevues dans la cour de récréation de cette dernière, salafiste de surcroît (oui Bernard y a vu des barbus). Lui, quelque peu surpris par sa réflexion lui rétorquera que l’école est privée. Et dans le privé on porte ce qu’on veut Bernard. Peu au fait des lois, Bernard n’hésitera même pas à mentir et contribuer à la mauvaise presse déjà largement faite à ces quelques écoles encore trop peu nombreuses. Elles ne seraient selon lui, pas inspectées par l’académie, donc libres de moduler le programme scolaire à leur guise. Ce qui est faux et complètement vérifiable.

 

Bernard ou Tintin chez les mahométans

Un bon passage est aussi consacré au financement du culte musulman, sujet au combien épineux et sur lequel il continue d’entretenir les fantasmes. 3,8 millions auraient été donnés par le régime saoudien, depuis 2011, en faveur de la construction de mosquées. Le téléspectateur, s’imaginant la chose incommensurable, il est donc de bon aloi de rappeler que cette somme ne recouvre même pas le total nécessaire à la construction d’une petite mosquée en Île de France… Pour l’injection de métro-dollars wahhabite en Royaume de France, on repassera.

Ce reportage se termine (enfin) sur un court passage en prison. Lieux de « radicalisation » à souhait, on y observe notamment un barbu pour le moins menaçant, puis plus grand chose. Nulle explication n’est donnée quant au pourquoi de cette réislamisation soudaine de certains condamnés. Ça aurait pu être intéressant, ce pourquoi Bernard n’en a probablement pas parlé.

Alors, Dossier Tabou? Pas le moins du monde. Prise de risque? Aucune.

Qu’il aille faire le même reportage, sur le judaïsme de France, en singeant les organisations juives, insistant sur l’homophobie de certains rabbins et le refus des femmes loubavitchs de se baigner en présence d’hommes dans certaines piscines. Qu’il use du même argumentaire accusatoire à leur égard et fasse les mêmes constats quant au CRIF et aux liens étroits qu’entretiennent ces derniers avec l’entité israélienne, peu connue pour son respect des droits humains et de la laïcité. Pas sûr que la LDJ et ses supporters intellectuels ayant les clés des plateaux télé sauront restés sagement assis sur leur canapé…

Le premier titre envisagé par le présentateur aurait été « faut-il avoir peur de l’islam?« . Une question fermée, bien entendu, et à laquelle n’importe quel téléspectateur peu au fait de la religion musulmane, mais assidu quant à ses injections BFMiènne au quotidien, aurait répondu, après visionnage de ce document propagandiste, oui. Comment le français moyen peut ne pas avoir peur avec de telles images, mises en son de façon si angoissante, et accompagnées des propos graves et alarmant qu’ont été ceux du présentateur?

D’ailleurs, interrogé sur Europe 1 peu avant, il a bien tenu de préciser que si le titre plus haut ne fut pas retenu, la question reste « sous jacente ». Dans la même interview, il annonce clairement la couleur et l’objectif qu’il eut en tête. Son émission a été faite dans l’idée de faire avancer le débat (qui n’avancera que dans un sens particulier) et pousser les dirigeants à prendre les bonnes décisions. Bernard, un activiste de premier rang?

Ce reportage fut au final un condensé de tout ce que le journalisme français pouvait faire de plus minable en terme de traitement de la question musulmane. Racoleur, approximatif, mensonger, polémique, médiocre, sont les premiers qualificatifs qui nous viennent ainsi à l’esprit. Prosélytisme laïciste insistant, ton paternaliste et effrayant, mise en avant de personnalités n’ayant de représentants que le titre. Eloges faites à un islam dépolitisé (dans son sens originel), aseptisé, sans plus aucun impact sociétal et collectif. Incrimination de tout ce qu’aurait de visible, militant et collectivement impactant la religion musulmane. Accusations d’antisémitisme, suspicions à l’égard des organisations et mosquées musulmanes, doigt pointé envers ces musulmans visibles ne respectant pas les valeurs républicaines. Tout y est passé. Il fallait montrer qu’une partie (apparemment conséquente) des musulmans de/en France souhaitaient faire scission, et c’est réussi.

Pas un mot sur l’éthique musulmane, l’impact de la foi sur l’individu, de cette même foi sur son travail et ses relations avec l’autre. Nul temps ne fut donné à des musulmans ayant fait leur scolarité dans le privé musulman, aux difficultés que ces derniers pourraient rencontrer dans leur quotidien et leur insertion professionnelle. Aucune question ne fut posée à ces mêmes musulmans quant à leur conception de la liberté ou de leur rapport à la loi et ce qu’elle dit vraiment. Bernard ne montra aucun intérêt à chercher à mettre en image les terrains d’entente possibles et déjà effectifs entre les musulmans et ceux qui ne le sont pas. Rien n’a été dit non plus sur l’entreprenariat musulman et sur toutes ces associations aidant milliers d’assistés au quotidien. Où sont tous ces exemples de musulmans, pourtant visibles et des plus orthodoxes, ayant su réussir sur le plan économique, personnel et professionnel ? Pourquoi ne pas avoir tenté de montrer un visage, pour le coup véritablement tabou, plus réaliste et rassurant de la communauté musulmane en France ? 

Nul besoin de chercher à y répondre tant ses desseins semblent clairs. Bernard est un idéologue. D’un air condescendant et paternaliste, il regarde et commente le monde étranger, en l’écumant à la manière d’un Tintin moderne. Sous ses faux airs de journaliste impartial et dandy cultivé, il sème à sa manière les graines de la haine en mentant et grossissant tout ce qui pourrait justifier le rejet progressif de la communauté musulmane en France. De ses appels faits aux musulmans de se désolidariser de Daesh au regard dénué de compassion qu’il porta sur les Rohyngias, il ne fallait effectivement pas s’attendre à ce qu’il observe les sujets de son reportage avec les lunettes du bon sens et de la vérité.

Son rejet de l’orthodoxie musulmane est clair et à la mesure de son désir pressant de voir l’islam de France républicanisé prendre ici racine. Ce reportage, parfois dur à regarder tant les imbécilités et lieux communs y sont légions, aura au moins permis aux musulmans de définitivement comprendre de quel bois ce monsieur se chauffait.

Mais rassurez-vous, pour ceux encore hésitant, ce n’est probablement pas son dernier coup d’essai.